Avocats : Nullité de la clause de rémunération au « temps passé » sans autre précision

Une clause d’un contrat de prestations de services juridiques conclu entre un avocat et un client qui fixe le coût au temps passé, sans préciser une estimation du montant global, ne répond pas « à l’exigence de clarté et de compréhensibilité », a jugé jeudi la Cour de justice de l’Union européenne en considérant que le juge national peut « rétablir la situation dans laquelle se serait trouvé le consommateur en l’absence d’une clause abusive en laissant le professionnel sans rémunération pour les services fournis ».
Un particulier basé en Lituanie, considéré comme un « consommateur » au sens de la directive du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives, avait en l’espèce conclu cinq contrats de services juridiques avec un avocat, au temps passé, au taux horaire de 100 euros et les prestations fournies au cours des années 2018 et 2019 lui ont toutes été facturées au mois de mars 2019 pour un montant total de 9 900 euros, soit 99 heures, outre 194,30 euros de frais récupérables.
Les juges du fond n’ont satisfait que partiellement les demandes de l’avocat et saisie d’un pourvoi en cassation, la juridiction suprême lituanienne a interrogé la Cour quant à l’interprétation à donner aux dispositions relatives à la protection des consommateurs contre les clauses abusives et plus particulièrement sur la portée de l’exigence de « rédaction claire et compréhensible d’une clause d’un contrat de prestation de services juridiques » ainsi que sur les conséquences à en tirer si le caractère abusif de la clause est retenu par le juge national.
La Cour
Pour ce qui est de la clarté et de la compréhensibilité de la clause en question, cela suppose, estime la Cour, que le contrat expose, « de manière transparente le fonctionnement concret du mécanisme auquel se réfère la clause concernée, de sorte que le consommateur soit mis en mesure d’évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles », les conséquences économiques qui en découlent pour lui mais s’il peut être exigé du professionnel d’informer le consommateur sur « les conséquences financières finales de son engagement » qui dépendent d’événements futurs, imprévisibles et indépendants de la volonté du professionnel, les informations qu’il est tenu communiquer avant la conclusion du contrat doivent permettre au consommateur de « prendre sa décision avec prudence et en toute connaissance de la possibilité que de tels événements surviennent et des conséquences qu’ils sont susceptibles d’entraîner concernant la durée de la prestation de services juridiques concernée ».
Des informations qui peuvent varier, souligne la Cour, selon la prestation juridique à fournir et les règles professionnelles et déontologiques applicables, mais qui doivent comporter des « indications permettant au consommateur d’apprécier le coût total approximatif de ces services » telles, par exemple, une estimation du nombre d’heures prévisibles ou une facturation à intervalles raisonnables avec le détail des prestations accomplies et restant à accomplir.
La clause se bornant à mentionner le taux horaire, sans autres indications, est donc jugée contraire à l’exigence de rédaction claire et compréhensible.
Les conséquences de la nullité de la clause abusive sont variables et peuvent, selon le cas d’espèce, à l’appréciation du juge national, entraîner le remboursement des honoraires perçus par le professionnel ou la substitution à la clause nulle une « une disposition de droit national à caractère supplétif ou applicable en cas d’accord des parties ».