Bourse : L'interdiction de la vente à découvert compatible avec le droit de l'Union

L'avocat général Niilo Jääskinen. DR.
L'avocat général Niilo Jääskinen. DR.

La Cour de justice de l'Union européenne a rejeté le recours du Royaume-Uni à l'encontre de l'article 28 d'un règlement de 2012 permettant à l'Autorité européenne des marchés financiers (Aemf) d'intervenir, en cas d'urgence, sur les marchés des États membres pour interdire la vente de titres à découvert.

Londres contestait ce règlement sur la vente à découvertRèglement (UE) n° 236/12 du parlement européen et du Conseil, du 14 mars 2012, sur la vente à découvert et certains aspects des contrats d'échange sur risque de crédit, J.O.UE 86, p. 1., adopté dans de la foulée de la crise financière de 2011 et visant à empêcher une déstabilisation des marchés par cette pratique susceptible d'entraîner une chute brutale des cours, qui donne, selon elle, à l'Aemf un « très large pouvoir discrétionnaire »pour apprécier l'existence ou non d'une « menace » et mettre en œuvre une« véritable politique économique » sur la base de « critères hautement subjecifs ».

La vente à découvert consiste à vendre un actif que l'on a emprunté en pensant que son prix va plus ou moins rapidement baisser de manière significative et avec l'espoir de le racheter à un prix inférieur pour empocher la différence au moment où il faudra le racheter pour le restituer au prêteur. Elle peut également se pratiquer « à nu », c'est-à-dire que l'on vend à terme des titres que l'on ne possède pas en espérant pouvoir les racheter à un prix inférieur avant la date d'échéance fixée.

Pratiquée de manière massive par des traders mais également par des institutions financières réputées, la vente à découvert peut provoquer voire accélérer la baisse du cours d'un actif. Elle est jugée en partie responsable des mouvements spéculatifs sur les marchés et a été mise en cause pendant la crise financière de 2008 et de de 2011. 

Pour rejeter le recours de Londres, la CourCJUE, gde. ch., 22 janv. 2014, n° C-270/12, Royaume Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, c/ parlement européen et conseil de l'Union européenne. estime que l'article 28 du règlement n'octroie à l'Aemf « aucune compétence autonome qui irait au-delà des compétences dévolues à cette autorité lors de sa création » dans la mesure où ses pouvoirs « sont encadrés de façon précise et sont susceptibles d'un contrôle juridictionnel au regard des objectifs fixés par l'autorité qui les lui a délégués ».

Cette décision est néanmoins une surprise car elle prend à contre-pied les conclusions de l'avocat général Niilo Jääskinen du 12 septembre dernier qui estimait que cet article 28 du règlement litigieux devait être annulé au motif« que l’article 114 TFUE ne fourni[ssai]t pas une base juridique adéquate »pour son adoption.