CNSA : Pas de contributions sociales en cas d’affiliation au régime de sécurité sociale d’un autre État membre

Cour de justice de l'Union européenne

Les revenus du patrimoine de résidents français affiliés au régime de sécurité sociale suisse ne peuvent pas être soumis, a jugé la Cour de justice de l’Union européenne, « à des contributions sociales visant à financer des prestations de sécurité sociale en France ».

Résidents fiscaux français affiliés au régime de sécurité sociale suisse, un des conjoints avait effectué toute sa carrière professionnelle en Suisse et en 2016, l’administration fiscale française a assujetti le couple, au titre de revenus du patrimoine perçus en France au cours de l’année 2015, à des contributions et prélèvements affectés, notamment, à la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

Les prestations gérées par cet organisme et financées par les contributions et prélèvements en cause étant, selon les contribuables récalcitrants, des prestations de sécurité sociale, ils ont contesté leur assujettissement à ces contributions et prélèvements au motif qu’affiliés au régime de sécurité sociale suisse, ils n’avaient pas à contribuer au financement du régime de sécurité sociale français car le règlement de l’Union sur la coordination des systèmes de sécurité socialeRèglement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, J.O. 2004, L 166, p. 1, et rectificatif J.O. 2004, L 200, p. 1. dispose que les personnes auxquelles il est applicable « ne sont soumises qu’à la législation d’un seul État membre, la Suisse étant considérée à cet égard comme un État membre ».

Saisie du litige, la cour administrative d’appel de Nancy a émis des doutes sur la nature des prestations financées par les contributions et prélèvements affectés à la CNSA et a demandé à la Cour de justice si ces prestations, c’est-à-dire l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et la prestation compensatoire du handicap (PCH), peuvent ou non être considérées comme des prestations de sécurité sociale.

La CourCJUE, 14 mars 2019, n° C-372/18, ministre de l’action et des comptes publics c/ M. et Mme Raymond Dreyer. rappelle liminairement qu’une prestation peut être considérée comme une prestation de sécurité sociale dans la mesure où elle est « octroyée aux bénéficiaires en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire de leurs besoins personnels, sur la base d’une situation légalement définie » et se rapporte « à l’un des risques visés par le règlement en cause », soulignant que la prise en compte des ressources du bénéficiaire aux seules fins du calcul du montant effectif des prestations sur la base de critères objectifs et légalement définis « n’implique pas une appréciation individuelle des besoins personnels de ce bénéficiaire » et, en l’espèce, selon la Cour, il en est ainsi de l’APA et de la PCH dans la mesure où la prise en compte des ressources du bénéficiaire ne concerne que les modalités de calcul de ces prestations, ces dernières devant être octroyées lorsque le demandeur remplit, indépendamment du niveau de ses ressources, les conditions qui ouvrent le droit aux prestations.

La Cour précise, en outre, que la nécessité d’évaluer, aux fins de l’octroi de l’APA et de la PCH, le degré de perte d’autonomie ou de handicap du demandeur n’implique pas non plus « une appréciation individuelle des besoins personnels de ce demandeur » puisque cette évaluation de la perte d’autonomie et du handicap est « effectuée par un médecin ou un professionnel d’une équipe médico-sociale ou par une équipe pluridisciplinaire au regard de grilles, de listes et de référentiels prédéfinis », c’est à-dire à partir de critères objectifs et légalement définis qui, dès lors qu’ils sont remplis, ouvrent le droit à la prestation correspondante.

Dès lors, indique la Cour, que l’APA et la PCH sont des « prestations de sécurité sociale », il n’y a pas lieu, estime-t-elle, de vérifier si ces deux prestations sont des « prestations spéciales en espèces à caractère non contributif » au sens du règlement, la Cour ayant déjà jugé que ces deux notions s’excluent mutuellement.