Marques : Laguiole n'obtient la protection que pour la coutellerie et les couverts

Couteaux Laguiole

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a confirmé que la société Forge de Laguiole peut s’opposer à l’enregistrement de la marque Laguiole dans le domaine de la coutellerie et des couverts mais elle ne peut, en revanche, s’opposer à l’enregistrement de la marque Laguiole dans des domaines dans lesquels elle n’exerce pas effectivement une activité.

Gilbert Szajner, un habitant du Val-de-Marne, avait demandé en 2001 l’enregistrement de la marque communautaire Laguiole pour de nombreux produits et services, ce qui lui a été accordé en 2005 par l’EUIPO (Office de l’UE pour la propriété intellectuelle). Forge de Laguiole, une société française connue pour ses couteaux, en avait demandé l’annulation en faisant valoir que, selon le droit français, sa dénomination sociale, dont la portée n’est pas seulement locale, lui donnait le droit d’interdire l’utilisation d’une marque plus récente et c’est ainsi qu’en 2011, l’EUIPO a fait droit à la demande en raison « du risque de confusion existant entre la dénomination de cette société et la marque Laguiole », en déclarant la marque Laguiole nulle, à l’exception des services liés aux télécommunications.

M. Szajner a alors introduit un recours et le TribunalTUE, 1re ch., 21 oct. 2014, n° T-453/11, Gilbert Szajner c/ Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (OHMI). a annulé en partie la décision de l’EUIPO, confirmant l’annulation de la marque Laguiole uniquement pour les produits relevant de certains secteurs, tels que la coutellerie et les couverts, mais a, en revanche, maintenu la marque Laguiole pour les autres produits et services revendiqués en considérant que Forge de Laguiole n’avait pas « effectivement exercé d’activité dans ces domaines ».

Insatisfait de l’arrêt rendu par le Tribunal, l’EUIPO, soutenu par Forge de Laguiole, a introduit un pourvoi que la CourCJUE, 5 avr. 2017, n° C-598/14, EUIPO c/ Gilbert Szajner. a rejeté aujourd’hui en relevant liminairement que, lors de l’appréciation de la protection de la dénomination d’une société par le droit national d’un État membre, le Tribunal doit appliquer les règles du droit national telles qu’interprétées par les juridictions nationales à la date à laquelle il rend sa décision. Et en l’espèce, il a pris en considération une décision de la Cour de cassationCom., 10 juill. 2012, n° 08-12010, société Cœur de princesse c/ société Mattel France. rendue postérieurement à la décision de l’EUIPO selon laquelle il s’en déduit que « la protection dont peut se prévaloir Forge de Laguiole au titre de sa dénomination sociale ne vaut que pour les activités effectivement exercées par cette entreprise ».

La Cour estime par ailleurs que bien que le Tribunal n’ait pas explicitement mentionné, au préalable, les critères au regard desquels les activités effectivement exercées par Forge de Laguiole devaient être déterminées, il a expressément « tenu compte, lors de l’examen de ces activités, non seulement de la nature des produits en cause, mais aussi de leur destination, de leur utilisation, de la clientèle concernée par ceux-ci ainsi que de leur mode de distribution » pour en conclure que le Tribunal a correctement déterminé les activités effectivement exercées par Forge de Laguiole et a donc eu raison de limiter l’annulation de la marque Laguiole aux seuls produits relevant de ces activités, c’est-à-dire ceux relevant de certains secteurs, tels que la coutellerie et les couverts.