Marques : L'EUIPO va devoir se repencher sur le Rubik's cube

Rubik's cube.
Rubik's cube.

La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a annulé l’arrêt du tribunal et la décision de l’Euipo (ex-Ohmi) validant l’enregistrement de la forme du Rubik’s cube comme marque de l’Union au motif qu'ils auraient dû prendre en compte des éléments fonctionnels non visibles du produit représenté par cette forme, tels que sa capacité de rotation.

À la demande de Seven Towns, une société britannique qui gère notamment des droits de propriété intellectuelle liés au « Rubik’s cube », l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (Euipo, European Union Intellectual Property Office) a, en 1999, enregistré comme marque tridimensionnelle, pour des « puzzles en trois dimensions », la célèbre forme cubique

En 2006, la société Simba Toys, un producteur de jouets allemand, a demandé à l’Eiupo d’annuler la marque tridimensionnelle au motif notamment qu’elle comportait « une solution technique consistant dans sa capacité de rotation  » et une telle solution ne pouvait être protégée qu’au titre du brevet et non en tant que marque. L’Euipo a rejeté son argumentation et Simba Toys a saisi le tribunal de l’Union européenne qui a aussi rejeté son recoursTUE, 25 nov. 2014, n° T-450/09, Simba Toys GmbH & Co. KG c/ Office des marques de l'Union (OHMI). au motif que « la forme cubique en cause ne comporte pas une fonction technique qui l’empêcherait d’être protégée en tant que marque », soulignant que que la solution technique caractérisant le Rubik’s cube ne résulte pas « des caractéristiques de cette forme mais, tout au plus, d’un mécanisme interne et invisible du cube ».

Saisie du pourvoi, la CourCJUE, 10 nov. 2016, n° C-30/15, Simba Toys GmbH & Co. KG c/ EUIPO. rappelle que le règlement 40/94Règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire, J.O.UE, 1994, L 11, p 1. vise à empêcher que le droit des marques confère à une entreprise un monopole sur des solutions techniques ou des caractéristiques utilitaires d’un produit et en l'espèce, les caractéristiques essentielles de la forme litigieuse consistent en un cube et une structure en grille figurant sur chacune des faces de ce cube et quant à la question de savoir si l’enregistrement de la forme en question comme marque de l’Union est susceptible de conférer à Seven Towns un monopole sur une solution technique, il y a lieu d’examiner si cette forme est nécessaire à l'obtention d’un résultat technique.

Contrairement à ce qu'avait retenu le tribunal, la Cour estime que les caractéristiques essentielles de la forme cubique en cause doivent être appréciées au regard de la fonction technique du produit que cette forme représente et, en particulier, il incombait au tribunal de prendre en considération « des éléments non visibles sur la représentation graphique de cette forme, tels que la capacité de rotation des composants individuels d’un puzzle à trois dimensions » et de définir « la fonction technique du produit concerné ».

La Cour estime aussi que le fait que Seven Towns ait demandé l’enregistrement du signe litigieux pour les « puzzles à trois dimensions » en général sans se limiter à ceux ayant une capacité de rotation ne fait pas obstacle à la prise en compte de la fonction technique du produit représenté par la forme cubique en cause et la rend même nécessaire, puisque la décision sur cette demande est susceptible d’affecter tous les fabricants de puzzles tridimensionnels dont les éléments représentent la forme d’un cube.

L’arrêt du tribunal et la décision de l’EUIPO sont annulés et il appartiendra à cette dernière de reprendre tout à zéro. Un vrai casse-tête.