BEAC : Immunité d’exécution oui, immunité de juridiction non

LexTimes avait évoqué l’an dernier un arrêt de la Cour de cassation cassant un arrêt rendu sur renvoi après une première cassation et ordonnant la mainlevée d’une saisie-attribution de 109 046,10 euros, opérée sur les avoirs du bureau parisien de la banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) dans les livres de BNP Paribas, à la demande d’un ancien salarié qui avait obtenu gain de cause devant la juridiction prud’homale.
La première chambre civile avait rendu, au visa des articles L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile, cet arrêt
Le salarié en question, Charles Pourcin, s’est manifesté ce matin auprès de la rédaction de LexTimes pour se plaindre qu’un arrêt rendu sur le fond de son affaire, il y a dix jours, le 13 décembre 2017, par la chambre sociale de la Cour de cassation
La rédaction de LexTimes entend donc profiter de cette occasion que lui donne M. Pourcin pour préciser, à lui et à tous ses lecteurs, que sa petite équipe réduite ne lui permet effectivement pas de couvrir toute l’actualité juridique et judiciaire nationale, européenne et internationale mais, bien évidemment, lorsqu’un lecteur prend la peine de nous alerter sur telle ou telle décision digne d’intérêt, nous ne manquons pas de lui accorder toute l’attention qu’elle mérite.
Cela étant précisé, il ressort de l’arrêt rendu il y a dix jours par la chambre sociale de la juridiction suprême que, cadre à la banque de France, Charles Pourcin a été détaché auprès de la BEAC en qualité de directeur adjoint de la formation à compter du 16 janvier 1993, avant d’être engagé directement par la BEAC, au moment où il a fait valoir ses droits à la retraite auprès de la banque de France, en qualité de directeur de service au siège central à compter du 1er octobre 1999, selon un contrat à durée déterminée d’une durée d’un an renouvelé à plusieurs reprises et pour la dernière fois jusqu’au 31 mars 2004.
La cour d’appel
À l’appui de son pourvoi, la BEAC invoquait un premier moyen développant en ses quatre branches l’immunité de juridiction dont elle bénéficie en sa qualité d’organisation internationale que la Cour de cassation écarte sans ménagement en approuvant la cour d’appel qui avait retenu qu’en application de l’accord de siège, elle ne pouvait être attraite devant le tribunal arbitral institué par ses statuts que « si elle renonçait explicitement à son immunité de juridiction, ce qu’elle n’avait pas fait en l’espèce, et que la cour de justice de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale n’était pas compétente pour un litige sur un contrat de travail régi par le droit local » et en outre, l’accord de siège entre le gouvernement de la République du Cameroum et la BEAC ne prévoyait pas de « recours de nature juridictionnelle présentant des garanties d’impartialité et d’équité ».
Par le second moyen, la banque a fait plaider qu’à défaut d’immunité de juridiction, les juridictions françaises se devaient de faire une stricte application du droit du travail camerounais applicable en la matière et sur ce point, le juge du fond français — qui applique une loi étrangère en recherchant et en justifiant la solution donnée à la question litigieuse par le droit positif de l’État concerné — est souverain, dit la chambre sociale de la juridiction suprême, l’application que le juge fait du « droit étranger, quelle qu’en soit la source, légale ou jurisprudentielle, échappe, sauf dénaturation non invoquée en l’espèce, au contrôle de la Cour de la cassation ».
Sur le fond, le pourvoi étant rejeté, la décision des juges du fond est à présent définitive et la banque est redevable à M. Pourcin des sommes mises à sa charge par le Conseil de prud’hommes de Paris en novembre 2009 et confirmées par la cour d’appel de Paris en décembre 2014.
N’empêche que [...].