Information inexacte et trompeuse : Sanctions pécuniaires pour MND et son principal dirigeant

MND sanctionné par l'AMF

La commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF) a infligé une sanction pécuniaire de 400 000 euros à la société Montagne et Neige Développement (MND) pour manquements à ses obligations d’information, son président-directeur général écope, lui, d’une sanction de 150 000 euros pour les mêmes motifs et pour avoir supprimé 38 000 courriels de sa messagerie électronique.

Créée en 2004, MND, société mère d’un groupe spécialisé dans l’aménagement de domaines skiables et de sites loisirs employant 350 salariés, a été introduite en bourse en octobre 2013 à l’occasion d’une levée de fonds de 21,2 millions d’euros destinée partiellement à acquérir le groupe austro-suédois Snownet et est contrôlée par son fondateur et président-directeur général, Xavier Gallot-Lavallée, via la société Montagne & Vallée qui en est le principal actionnaire.

Le chiffre d’affaires pour l’exercice 2013-2014 a été revu, fin janvier 2014, à la baisse à 65 millions d’euros au lieu des 75 millions d’euros dont il était fait état dans le prospectus d’introduction en bourse quatre mois plus tôt et une nouvelle augmentation de capital de 2,5 millions d’euros réservée à des institutionnels a été annoncée le 7 juillet 2014, outre, deux semaines plus tard, l’annonce d’une equity line avec Kepler Cheuvreux portant sur « un maximum de 2,5 millions d’actions susceptibles d’être émises pendant 36 ans avec une décote de 5 % par rapport au cours pondéré moyen de l’action au moment de l’émission ». Et pour couronner le tout, annonce, le 9 octobre 2014, que les objectifs de chiffre d’affaires de 150 millions d’euros et de rentabilité opérationnelle supérieure à 10 % au titre de l’exercice 2015-2016 ne seraient pas atteints, faisant fluctuer le cours du titre d’un peu plus de 8 euros mi-janvier 2014 à 1,56 euro (-81 %) au 31 décembre 2014.

Il était plus particulièrement reproché à MND de ne pas avoir précisé que 7 des 21 millions d’euros levés en octobre 2013 étaient destinés au règlement de factures de fournisseurs échues, de ne pas avoir communiqué « dès que possible » que le chiffre d’affaires était revu à la baisse de 75 à 65 millions d’euros et sans indiquer le nouveau périmètre fondant la nouvelle prévision et, enfin, de même, de ne pas avoir communiqué « dès que possible » que les objectifs 2015-2016 ne seraient pas atteints. Outre ces quatre manquements, il est également reproché à Xavier Gallot-Lavallée de ne pas avoir remis aux enquêteurs les courriels relatifs à l’enquête lors de leur visite, le 25 février 2016, dans les locaux de la société.

S’agissant du règlement de 7,05 millions d’euros de factures fournisseurs échues avec les fonds levés lors de l’introduction en bourse, la mention figurant dans le résumé du prospectus ou la note d’opération selon laquelle les fonds serviraient à « accompagner l’accélération de la croissance des activités historiques du groupe » ne peut, juge sévèrement le gendarme de la bourseAMF, 7 mai 2018, n° 17-06, société Montagne et Neige Développement (MND) et a., raisonnablement être « interprétée comme incluant implicitement le règlement des arriérés fournisseurs » et l’information diffusée, à la date de publication de la note d’opération, était « inexacte » mais aussi « trompeuse » dans la mesure où rien ne donnait à penser dans la note d’opération que les fonds levés serviraient à payer des arriérés fournisseurs puisque, de surcroît, il était indiqué que MND disposait des ressources nécessaires « pour faire à ses obligations et à ses besoins de trésorerie d’exploitation pour les 12 prochains mois ».

Pour ce qui est de l’objectif de chiffre d’affaires revu à la baisse de 10 millions d’euros à 65 millions d’euros qui n’a été révélé au marché que le 29 janvier 2014, il était connu depuis le 6 décembre 2013 selon la prévision du contrôleur de gestion de la société qui anticipait, à cette date, un chiffre d’affaires compris entre 56,4 et 65,5 millions d’euros et la diffusion de cette information, un mois et 23 jours après avoir « acquis un caractère privilégié », a été faite tardivement sans justifier d’un motif permettant d’en reporter la communication au public.

Il en va de même de l’information privilégiée relative aux objectifs pour l’exercice 2015-2016 qui était connue dès le 3 avril 2014 et qui n’a été communiquée au public que le 9 octobre 2014, soit plus de six mois plus tard.

Tous ces manquements sont imputables à M. Gallot-Lavallée en sa qualité de président-directeur général de MND et il lui est aussi reproché de n’avoir remis aux enquêteurs qu’une copie de sa messagerie professionnelle après l’avoir « expurgée de plus de 38 000 courriels qui entraient dans le champ de la demande de communication faite la veille à l’occasion de leur visite effectuée dans les locaux de la société », étant précisé que la suppression de ces courriels n’a pu être détectée que « grâce à un logiciel d’investigation numérique » et une expertise réalisée à la demande des enquêteurs de l’AMF a confirmé que la suppression « était intervenue les 25 et 26 février 2016 ».

Les sanctions pécuniaires infligées tiennent compte de la gravité des manquements constatés et la publication de cette décision, susceptible d’appel, est ordonnée sans anonymisation car elle n’est « ni susceptible de causer […] un préjudice grave et disproportionné, ni de nature à perturber gravement la stabilité du système financier ou encore le déroulement d’une enquête ou d’un contrôle en cours ».

À 17h00, sur la bourse de Paris, le titre [FR0011584549, MND] perd 1,51 % à 4,25 € par rapport à la veille et s’adjuge une capitalisation de 56 millions d’euros. Une augmentation de capital avec maintien du droit préférentiel de souscription (DPS) annoncée fin mars 2018 et prévue pour le mois d’avril a été reportée sine die, le 3 avril, la veille de l’examen des griefs par la commission des sanctions.