Information privilégiée : Un ancien analyste de Standard & Poor’s sanctionné

Standard & Poor's

La Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF) a infligé une sanction pécuniaire de 90 000 euros à Lucas Sévenin, analyste chez Standard & Poor’s, pour avoir utilisé une information privilégiée concernant le titre Vallourec alors même qu’il était le principal interlocuteur de Vallourec, en charge de sa première notation puis de son suivi annuel.

Embauché en 2001 par le bureau parisien de l’agence de notation Standard & Poor’s en qualité d’analyste crédit, Lucas Sévenin a été promu en 2013 au grade directeur. Il suivait principalement les sociétés relevant du secteur pétrolier et gazier et assurait, en tant qu’analyste principal, la notation d’une douzaine de sociétés, en plus de sa participation au comité de notation d’une vingtaine d’autres sociétés. Il a ainsi été responsable, en 2011 de la première notation publique par S&P de la société Vallourec, cotée sur le compartiment A d’Euronext Paris, et de la surveillance annuelle de cet émetteur, d’abord comme analyste principal puis, à compter du 24 février 2015, comme analyste secondaire, et est intervenu à ce titre dans les réunions intéressant Vallourec jusqu’à son licenciement pour faute grave par S&P au mois d’avril 2016.

Il était reproché à M. Sévenin d’avoir, à trois reprises, manqué à son obligation d’abstention d’utilisation d’informations privilégiées auxquelles il avait accès dans le cadre de son travail. Il a ainsi acquis, le 30 juillet 2013, 1 820 titres Vallourec revendus le lendemain d’un compte ouvert au nom de sa mère chez Bourse Direct alors qu’il détenait une information privilégiée relative à la progression des résultats de Vallourec pour le premier semestre 2013 et à la confirmation de ses perspectives positives pour l’exercice 2013. De même, il a vendu, le 26 février 2014, 5 000 titres du même compte alors qu’il détenait une information privilégiée quant aux bons résultats 2013 et des perspectives mitigées pour 2014 ainsi que la vente de 7 510 titres, les 21 et 23 avril 2015, alors qu’il détenait une information privilégiée concernant les mauvais résultats 2015 et la suppression d’environ 2 000 emplois.

Dans le premier cas, Lucas Sévenin a utilisé l’information le 30 juillet 2013 à 16h30 et les résultats de la société par voie de communiqué de presse n’ont été annoncés qu’à 17h45, le titre a signé une hausse de 2,88 % le lendemain dans un volume d’échange élevé de 1 421 713 pièces contre environ 800 000 habituellement. Dans le second, l’information utilisée — à mauvais escient puisqu’il a « shorté » le titre qui a pris 4,85 % le lendemain et a donc enregistré une moins-value — le 26 février 2014 à 17h05 n’a été rendue publique qu’à 17h45. Dans le troisième et dernier cas, l’information utilisée les 21 et 23 avril 2015 n’a été rendue publique que le 29 avril 2015 à 17h45. Dans les deux premiers cas, la matérialité des faits a été reconnue mais, en revanche, elle était discutée dans le troisième cas dans la mesure où il disposait « des titres cédés depuis neuf mois ». L’opération « aller-retour » des 30 et 31 juillet 2013 lui a permis de réaliser une plus-value de 2 465 euros, une moins-value de 6 600 euros sur la cession du 26 février 2014 et une économie de perte de 44 980 euros sur les transactions des 21 et 23 avril 2015.

Le 21 avril 2015, M. Sévenin a par ailleurs accepté de payer une somme de 350 000 euros au titre d’une transaction pénale conclue avec le parquet de Bruxelles contre une « extinction des poursuites à son encontre des chefs de délit d’initié et de blanchiment de capitaux ».

Pour prononcer une sanction pécuniaire de 90 000 euros, la Commission des sanctionsAMF, 18 déc. 2017, n° 15, Lucas Sévenin. a été tenu compte du fait que M. Sévenin a été licencié pour faute grave par S&P en avril 2016, qu’il est actuellement au chômage et qu’il ne possède aucun bien immobilier.