Confiscation : L’interposition d’une personne morale sans incidence pour une saisie conservatoire

La personnalité morale dont jouit une société civile immobilière ne fait pas obstacle à la saisie d’un élément de son actif pour garantir la peine de confiscation à laquelle des associés majoritaires sont susceptibles d’être condamnés pour des faits de blanchiment, a jugé la cour de cassation dans l’affaire Wildenstein.
Depuis le décès du richissime marchand d’art Daniel Wildenstein en octobre 2001, à l’âge de 84 ans, la mésentente entre les héritiers a amené le tribunal a désigné un administrateur provisoire de l’indivision post-communautaire et successorale de Daniel Wildenstein et de la société civile immobilière (SCI) Marienthal constituée en 1996, dont les héritiers détiennent 99,55 % et dont l’actif principal était le château de Marienthal, à Verrières-le-Buisson (Essonne).
Dénonçant les conditions dans lesquelles elle avait été obligée de renoncer à la succession de son mari, sa jeune veuve avait déposé plainte avec constitution de partie civile, quelques mois avant qu’elle ne décède elle-même en novembre 2010, du chef d’abus de confiance que le parquet a étendu à des faits « d’organisation frauduleuse d’insolvabilité, blanchiment, recel, faux en écritures privées et usage » et elle a ensuite été jointe à une autre procédure ouverte le 29 août 2011 du chef de fraude fiscale sur plainte de l’administration fiscale à l’encontre des héritiers Wildenstein pour avoir omis de mentionner dans la déclaration de succession des biens détenus dans des « paradis fiscaux ».
Deux mois plus tôt, l’assemblée générale de la SCI Marienthal qui s’était tenue le 30 juin 2011 avait décidé de mettre en vente son principal actif immobilier, le château de Marienthal, et c’est ainsi qu’apprenant qu’une promesse avait été signée avec une société chypriote pour lui vendre le château moyennant la somme de 4 millions d’euros, le juge d’instruction a ordonné, le 17 janvier 2012, la saisie entre les mains du notaire instrumentaire de la « créance constituée au profit de l’indivision Wildenstein à hauteur de 3,98 millions d’euros sur la société Marienthal, en tant qu’élément du patrimoine des indivisaires, susceptibles d’être mis en examen du chef de blanchiment et pour permettre, le cas échéant, une confiscation en valeur du produit de l’infraction de fraude fiscale ».
L’administrateur provisoire a alors demandé la restitution du bien saisi et, a minima, le déblocage d’une partie des fonds pour lui permettre de payer une partie du passif social, dont une créance de 1,78 million d’euros d’un des héritiers, Guy Wildenstein, correspondant à des avances en compte courant consenties à la société du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2011. Une ordonnance du juge d’instruction limite la restitution à une somme de 519 411 euros correspondant à diverses dettes de la société mais, sur appel, la chambre de l’instruction de la cour de Paris
Pour infirmer les ordonnances du juge d’instruction, la cour de Paris avait retenu que la société est « seule propriétaire du produit de la cession d’une partie de ses actifs immobiliers », ajoutant que rien ne permettait de considérer que ce produit pourrait faire l’objet « d’une décision des actionnaires, précipitée ou clandestine, de distribution, au titre d’un hypothétique bénéfice ».
Mais c’est au visa de l’article 131-21 du code pénal combiné à l’article 706-148 du code de procédure pénale issus de la loi du 27 mars 2012