Injure : Les propos de Bedos ne visaient que Morano et non la fonction qu’elle incarnait

Nadine Morano et Guy Bedos.
Nadine Morano et Guy Bedos.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi de Nadine Morano à l’encontre de l’arrêt confirmatif de la cour d’appel de Nancy la déboutant de ses demandes dirigées contre Guy Bedos qui l’avait qualifiée de « conne » et « salope » lors d’un spectacle, le 11 octobre 2013, à Toul (Meurthe-et-Moselle).

Conseillère municipale LR de la ville de Toul et conseillère régionale à la date des propos litigieux, l’ancienne ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle (2010-2012), Nadine Morano, 53 ans, avait déposé plainte avec constitution de partie civile à la suite des propos publics tenus le 11 octobre 2013 par Guy Debos à Toul, à la salle de l’Arsenal, à l’occasion d’un spectacle :

Ah Nadine Morano a été élue ici à Toul ? Vous l’avez échappé belle ! On m’avait promis qu’elle serait là… Quelle conne ! Ah la salope… Qu’elle est vulgaire, mais qu’elle est conne celle-là ! Je l’emmerde ! Il y en a qui applaudissent, il y en a qui huent, c’est bien. C’est la démocratie. Elle est de droite et lâche. C’est un pléonasme. Morano, Morano. Elle répète sans arrêt, le peuple, je connais, j’en viens… Bah retournes y connasse.

Faisant état de ses mandats de conseillère municipale et régionale, la plainte de Mme Morano était articulée sur le fondement de l’article 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse qui dispose que « l’injure commise […] envers les corps ou les personnes désignés par les articles 30 et 31 [membres du ministère, […] de l'une ou de l'autre Chambre, un fonctionnaire public, un dépositaire ou agent de l'autorité publique, un ministre de l'un des cultes salariés par l'État, un citoyen chargé d'un service ou d'un mandat public […] un juré ou un témoin] sera punie d'une amende de 12 000 euros » et pour relaxer l’artiste et débouter l’élue de ses demandes, l’arrêt confirmatif des juges du fond rappelait qu’il convenait d’apprécier si les propos poursuivis « se rattachent ou non à la fonction d’élue de Mme Morano » et prendre en compte « les circonstances dans lesquelles les propos ont été tenus et l’intention de leur auteur ».

Au cas particulier, avait considéré la cour de Nancy, il n’y a injure envers les personnes désignées à l’article 31 de la loi de 1881 que dans la mesure où « les expressions outrageantes visent la qualité de la victime et sont en relation directe et étroite avec cette qualité ». Tel n’est pas le cas en l'espèce pour les magistrats nancéens qui avaient relevé que les propos litigieux « ne se rattachent pas aux fonctions publiques de l’élue par le seul fait pour M. Bedos de s’interroger sur la qualité d’élue de Mme Morano et d’y faire référence » et ne font que désigner la personne privée et ne contiennent « aucune référence à la qualité de dépositaire de l’autorité publique de la partie civile ».

Raisonnement validé par la chambre criminelle de la Cour de cassationCrim., 7 juin 2017, n° 16-85574, Nadine Morano c/ Guy Bedos. pour rejeter le pourvoi en soulignant que les propos incriminés visaient « la personne de la partie civile mais ne constituaient pas une atteinte portée à la fonction publique qu’elle incarnait à l’époque de leur diffusion ».