Santé : La toxicité des poppers est faible et le risque d’abus non établi, dixit le Conseil d’État

Pour la seconde fois en quatre ans, la Haute juridiction administrative a annulé une disposition interdisant l’offre et la cession au public de « produits contenant des nitrites d’alkyle aliphatiques, cycliques ou hétérocycliques et leurs isomères », connus sous le nom de « poppers », au motif que ces produits ont « une toxicité faible » et qu’aucune étude n’établit qu’ils présentent « un risque de pharmacodépendance ou d’abus ».

Une première décisionCE, 10e et 9e sous-sect. réunies, 15 mai 2009, n° 312449, société France conditionnement création; n° 312454, syndicat national des entreprises gaies et société men’s club ; n° 312485, association rassemblement des amis de la sauge divinatoire et du poppers. avait annulé en 2009 un décretDécret n° 2007-1636 du 20 novembre 2007 relatif aux produits contenant des nitrites d'alkyle aliphatiques, cycliques, hétérocycliques ou leurs isomères destinés au consommateur et ne bénéficiant pas d'une autorisation de mise sur le marché, J.O., n° 271, 22 nov. 2007, p. 19070, n° 19. de 2007 du premier ministre qui interdisait « la fabrication, l’importation, l’exportation, l’offre, la détention en vue de la vente ou de la distribution à titre gratuit » de ces produits et avait institué en contravention de cinquième classe le fait d’y contrevenir, outre la confiscation du produit en tant que peine complémentaire.

Pour annuler ce décret de 2007, le Conseil d’État avait retenu à l’époque que « les substances litigieuses ont une toxicité faible aux doses inhalées habituelles » et si les effets toxiques observés peuvent être parfois graves lorsque les produits litigieux sont associés à certains médicaments d’usage fréquent, « ces effets sont relativement rares et mal mesurés », les quelques rares accidents sur une longue période ayant eu pour origine un usage anormal des produits considérés « ingérés ou consommés en association avec d’autres produits ».

Aucune étude scientifique ou enquête, relevait le Conseil d’État, n’est produite ou citée permettant d’établir qu’au regard « des dangers observés, seule la mesure d’interdiction totale de tous les produis contenant des nitrites quelle qu’en soit la forme serait de nature à y répondre » et ce décret du premier ministre avait donc été jugé excessif et disproportionné au regard « des risques que représente la commercialisation de ce produit pour la santé et la sécurité des consommateurs ».

L’arrêté attaqué de 2011Arrêté du 29 juin 2011 portant application d'une partie de la réglementation des stupéfiants aux produits contenant des nitrites d'alkyle aliphatiques, cycliques ou hétérocycliques et leurs isomères, J.O., n° 156, 7 juill. 2011, p. 11790, n° 32. du ministre du travail se borne à interdire « l’offre et la cession au public des produits, à l’exception des médicaments, contenant des nitrites d’alkyle aliphatiques, cycliques ou hétérocycliques et leurs isomères » sans y attacher aucune sanction et son annulationCE, 10e et 9e sous-sect. réunies, 3 juin 2013, n° 352484, syndicat national des entreprises gaies, sociétés men’s club et new millenium production ; n° 352485, société France conditionnement création. repose sur le même constat. La toxicité est faible aux doses inhalées habituelles, aucune étude scientifique ou enquête n’est produite permettant d’établir que les poppers présentent un risque de pharmacodépendance ou d’abus, une interdiction générale ne se justifie dont pas, en conclut pour la seconde fois le Conseil d’État.

Utilisés à l’origine pour traiter certaines affections cardiaques, ces produits — qui ont pour effet annexe de donner un sentiment d’euphorie et de relaxation — sont utilisés depuis les années 70 dans le milieu gay pour leurs qualités vasodilatatrices.