Prud'hommes : Compétence ou non en cas d’accident ou de maladie professionnelle

Si l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail relève de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale, c’est la juridiction prud’homale qui est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail, a jugé la Cour de cassation dans deux arrêts distincts rendus jeudi dernier.
L’obligation de sécurité à laquelle est tenu l’employeur, en vertu de l’article L. 4121-1 du code du travail, lui impose, rappelle la Cour dans une note explicative relative à ces deux arrêts, de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs et lui interdit, dans l’exercice de son pouvoir de direction, de prendre des mesures qui auraient pour objet ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité des salariés »
Ainsi lorsque le dommage n’est pas pris en charge par la législation sur les accidents du travail ou les maladies professionnelles, le salarié peut engager une action sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile contractuelle
Quand le salarié est victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, les règles spécifiques du code de la sécurité sociale, notamment les articles L. 142-1 et L. 451-1, doivent s’appliquer et se fondant sur ces dispositions, la chambre sociale, après avis de la deuxième chambre civile, en avait déduit que si la juridiction prud’homale est seule compétente pour connaître d’un litige relatif à l’indemnisation d’un préjudice consécutif à la rupture du contrat de travail, relève, en revanche, de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail, qu’il soit ou non la conséquence d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité
Le salarié ne peut donc former devant la juridiction prud’homale une action en dommages-intérêts pour manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité pour obtenir l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, solution qui a suscité de nombreuses interrogations sur la délimitation exacte des compétences respectives des juridictions prud’homale et de sécurité sociale qui sont illustrées par ces deux arrêts. Dans la première espèce
C’est compte tenu de ces solutions contrastées que la chambre sociale a voulu définir précisément la compétence et l’office du juge prud’homal. Elle dit ainsi pour droit, en premier lieu, que si l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail — qu’il soit ou non la conséquence d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité — relève de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale, la juridiction prud’homale est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail et pour allouer, le cas échéant, une indemnisation au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La Cour de cassation entend ainsi rappeler que même lorsque le salarié est victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, la juridiction prud’homale est seule compétente pour connaître de l’application des règles relatives à la rupture du contrat de travail, décisions qui ne remettent pas en cause les principes gouvernant la réparation des risques professionnels. Il est ainsi rappelé que la rente versée à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle « indemnise, d’une part, les pertes de gains professionnels et l’incidence professionnelle de l’incapacité et, d’autre part, le déficit fonctionnel permanent », ce qui fait que la perte tant de l’emploi que des droits à la retraite, même consécutive à un licenciement pour inaptitude, est réparée par l’application des dispositions du livre IV du code de la sécurité sociale
En second lieu, la chambre sociale juge qu’est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude lorsqu’il est démontré que l’inaptitude était consécutive à un manquement préalable de l’employeur qui l’a provoquée. En effet, dans une telle hypothèse, le licenciement, même s’il est fondé sur une inaptitude régulièrement constatée par le médecin du travail, trouve en réalité sa cause véritable dans ce manquement de l’employeur et si cette solution n’est pas nouvelle