Prison : Le droit à la retraite des détenus

Atelier de travail en prison. Photo DR.

Dans un arrêt rendu il y a deux semaines, la Cour européenne des droits de l'hommeCEDH, 7 juill. 2011, n° 37452/02, Stummer c/ Autriche. a considéré qu'il n'y avait pas violation des articles 4 et 14 de la Convention relatifs à l'esclavage et au travail forcé pour le premier et à la discrimination pour le second, à la suite d'une requête qui lui avait été soumise par un ressortissant autrichien qui se plaignait de ne pouvoir percevoir de retraite, faute d'avoir été affilié au régime de retraite pour le travail accompli au cours de ses 28 années de détention.

En France, la situation est diamétralement différente. Les personnes détenues bénéficient, dans le cadre de leur travail en prison, d'un régime de retraite particulier. Il faut ainsi distinguer ceux qui effectuent un travail ou un stage ou suivent une formation professionnelle à l'intérieur même de l'enceinte carcérale, de ceux qui travaillent à l'extérieur en cas de semi-liberté ou de placement à l'extérieur.

Le principe étant qu'un détenu "travaillant à l'extérieur" et percevant le SMIC peut valider quatre trimestres par an pour sa retraite. Un détenu "travaillant à l'intérieur" peut difficilement en valider un ou deux, en raison du faible montant de sa rémunération. En effet, la validation d'un trimestre pour la retraite suppose un revenu trimestriel au moins égal à 1 800 euros brut (200 fois le SMIC horaire 2011). Mais les revenus mensuels des travailleurs détenus ne dépassent pas 343 euros en moyenne.

C'est ainsi depuis le 1er janvier 1977Décret n° 77-239 du 15 mars 1977 portant application de la loi n° 75-1350 du 31 décembre 1975 relative à la situation des détenus au regard l'assurance vieillesse du régime général de la sécurité sociale, art. 1,J.O., 17 mars 1977, p. 1454, devenu l'article R.381-103 du code de la sécurité sociale (réd. D. n° 85-1353 du 17 déc. 1985, J.O., 21 déc. 1985, p. 14961., les personnes qui effectuent un travail en détention, ou suivent un stage de formation professionnelle sont affiliées à l'assurance vieillesse. Un paradoxe, selon l'Observatoire International des Prisons (OIP), car cela consiste à soumettre les personnes incarcérées aux règles de droit commun pour la cotisation à l'assurance vieillesse "alors que leurs modalités de rémunération sont dérogatoires au droit du travail".

D'après la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), pour le travail effectué en détention, les cotisations sont calculées sur le total des rémunérations brutes perçues par l'intéressé au dernier jour de chaque trimestre civil. Si le détenu est affecté au fonctionnement des services généraux de l'administration pénitentiaire, la cotisation vieillesse ouvrière et patronale est prise en charge par l'administration. "Elle est calculée sur un salaire forfaitaire mensuel égal au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) en vigueur au 1er janvier de l'année considérée calculé sur 67 heures", explique la CNAV. 

Cela diffère pour les détenus qui travaillent non pas pour l'administration pénitentiaire, mais en "ateliers" pour des entreprises privées. Dans ce cas, la cotisation salariale est prélevée sur leur rémunération. Pour ce qui est de la formation professionnelle, les condamnés qui suivent un stage de formation perçoivent le salaire forfaitaire applicable aux stagiaires de la formation professionnelle.

Concernant les condamnés bénéficiant d'une mesure de semi-liberté ou de placement à l'extérieur et qui exercent une activité professionnelle dans les mêmes conditions que les travailleurs libres, ils sont eux affiliés au régime d'assurance vieillesse dont ils relèvent au titre de cette activité.