Élection présidentielle : La double peine en cas d’irrespect du plafond des dépenses jugée constitutionnelle

Sur une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par l’ancien chef de l’État Nicolas Sarkozy, le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la Constitution la double répression, relevant de règles distinctes et constituant des sanctions de nature différente, qui frappe les candidats à l’élection du président de la République en cas de non-respect du plafond des dépenses électorales.
Selon les articles 3 de la loi du 6 novembre 1962 relative à l'élection du président de la République au suffrage universel et L. 52-11 du code électoral, les candidats à l'élection du président de la République sont en effet « tenus, au cours de la campagne, de respecter un plafond des dépenses électorales ». Lorsque la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (Cnccfp) constate un dépassement de ce plafond par un candidat, celui-ci est tenu de verser au Trésor public une somme égale au montant du dépassement mais la décision de cette commission peut faire l'objet d'un recours devant le Conseil constitutionnel par le candidat en cause. Le premier alinéa du paragraphe II du même article, qui renvoie au 3° du paragraphe I de l'article L. 113-1 du code électoral, prévoit en outre que le candidat ayant dépassé le plafond des dépenses électorales encourt également une amende de 3 750 euros et une peine d'emprisonnement d'un an.
L’ancien président Nicolas Sarkozy reprochait donc à ces dispositions de « contrevenir, en méconnaissance du principe non bis in idem, aux exigences de nécessité et de proportionnalité des peines », dans la mesure où elles permettent des poursuites et des sanctions pénales à l'égard de candidats à l'élection présidentielle ayant déjà été sanctionnés financièrement pour des faits identiques de dépassement du plafond des dépenses électorales par la Cnccfp et, en cas de recours, par le Conseil constitutionnel.
Le Conseil
En l’espèce, relève le Conseil, les dispositions contestées tendent à réprimer de mêmes faits qualifiés de manière identique mais, car il y a un mais, la sanction financière prononcée par la Cnccfp intervient à l'issue de l'examen par cette commission, sous le contrôle du Conseil constitutionnel, des comptes de campagne de chacun des candidats à l'élection du président de la République. En conférant à cette sanction un caractère systématique et en prévoyant que son montant est égal au dépassement du plafond des dépenses électorales, estime le Conseil, le législateur a entendu « assurer le bon déroulement de l'élection du président de la République et, en particulier, l'égalité entre les candidats au cours de la campagne électorale » alors qu’en instaurant une répression pénale des mêmes faits, qui exige un élément intentionnel et permet de tenir compte des circonstances de l'infraction et d'adapter la sévérité de la peine à la gravité de ces faits, le législateur a entendu « sanctionner les éventuels manquements à la probité des candidats et des élus ».
La sanction prononcée par la Cnccfp est « une pénalité financière, strictement égale au montant du dépassement constaté », ce qui fait dire au Conseil que sa nature est « différente » de la peine d'emprisonnement encourue par le candidat poursuivi pour le délit de dépassement du plafond des dépenses électorales, pour en déduire les deux répressions prévues par les dispositions contestées relèvent de « corps de règles qui protègent des intérêts sociaux distincts aux fins de sanctions de nature différente ». Nicolas Sarkozy, membre de droit du Conseil constitutionnel, qui a déjà été sanctionné financièrement par la Cnccfp, devra donc également répondre, à moins d'un miracle, pour les mêmes faits devant la juridiction correctionnelle.