QPC : Part « substantielle » du patrimoine est non équivoque et suffisamment précis

Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel n’a pas fait droit à la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soumise par l’ancienne ministre chargée de la francophonie, Yamina Benguigui, qui avait « sciemment omis de déclarer une part substantielle » de son patrimoine à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) lors de sa nomination, en mai 2012, dans le gouvernement Ayrault.

Condamnée à deux mois d’emprisonnement avec sursis, 5 000 euros d’amende et un an d’inéligibilité pour « méconnaissance, par un membre du gouvernement, des obligations déclaratives aux fins de prévention des conflits d’intérêts et de transparence dans la vie publique », Yamina Benguigui avait fait soulever, à l’occasion du pourvoi formé à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de ParisParis, ch. 5-12, 27 sept. 2016, Yamina Benguigui c/ ministère public., l’inconstitutionnalité du paragraphe I de l'article 5-1 de la loi n° 88-227du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie publique (rédaction loi n° 2011-412 du 14 avril 2011) qui dispose que « le fait […] d'omettre sciemment de déclarer une part substantielle de son patrimoine ou d'en fournir une évaluation mensongère qui porte atteinte à la sincérité de sa déclaration et à la possibilité pour la Commission pour la transparence financière de la vie politique d'exercer sa mission est puni de 30 000 € d'amende et, le cas échéant, de l'interdiction des droits civiques […] ».

Il était soutenu devant le juge constitutionnel que ces dispositions méconnaissent le principe de légalité des délits et des peines garanti par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et que la notion de « part substantielle » du patrimoine — dont dépend la caractérisation du délit réprimé par ces dispositions — ne répond à aucune définition précise et ne permet donc pas de déterminer l'élément constitutif de l'infraction.

Les dispositions contestées, rappelle le ConseilCons. constit., 23 juin 2017, n° 2017-639 QPC, Yamina Benguigui., érigent en délit le fait, pour les membres du gouvernement et pour les élus et dirigeants d'organismes publics tenus de déclarer leur patrimoine, d'omettre sciemment d'en déclarer une part substantielle.

En faisant référence à une « part substantielle » de patrimoine, poursuit le Conseil, les dispositions contestées répriment les seules omissions « significatives », au regard du montant omis ou de son importance dans le patrimoine considéré qu’il appartient aux juridictions compétentes d'apprécier au cas par cas. Les termes « part substantielle » ne revêtent pas un caractère équivoque et sont suffisamment précis, considèrent les Sages, pour garantir « contre le risque d'arbitraire » et il n’y a donc aucune méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines qui est écarté.

La chambre criminelle de la Cour de cassation devrait donc prochainement rejeter le pourvoi de Mme Benguigui contre l’arrêt la condamnant dès lors à juste titre pour les faits qui lui étaient reprochés.