LFR 2022 : L’audiovisuel public n’a pas nécessairement à être financé par une redevance

Saisi de la loi de finances rectificative pour 2022 par plus de soixante députés et de plus de soixante sénateurs, le Conseil constitutionnel a jugé vendredi conformes à la Constitution ses dispositions relatives au financement de l'audiovisuel public tout en les assortissant de deux réserves d'interprétation encadrant les choix futurs du législateur.
La contestation des deux recours portait sur l'article 6 qui supprime la contribution à l'audiovisuel public instituée par l'article 1605 du code général des impôts au profit de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde (ex-Audiovisuel extérieur de la France), Arte, TV5 Monde et l’Ina d’une part, et, d'autre part, remplace cette contribution par l'affectation au secteur public de l'audiovisuel d'une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée.
Députés et sénateurs reprochaient à ces dispositions de priver « de garantie légale la liberté de communication des pensées et des opinions ainsi que l'indépendance et le pluralisme des médias » faute d'assurer la pérennité du financement de l'audiovisuel public, soulignant qu'elles ne prévoyaient de lui affecter une fraction de taxe sur la valeur ajoutée que jusqu'au 31 décembre 2024 et dont le montant « insuffisamment défini » n'est pas garanti, dans la mesure où le législateur peut le modifier. Les députés requérants estimant par ailleurs que ces dispositions méconnaissaient le principe fondamental reconnu par les lois de la République résultant de la loi du 31 mai 1933 portant fixation du budget général de l'exercice 1933 et instaurant cette redevance au profit de l'audiovisuel public.
Le Conseil
Le Conseil constitutionnel sera le juge du respect du financement de l’audiovisuel public
Et s'il est loisible au législateur de modifier, dans son domaine de compétences, des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions, c'est à la condition que l'exercice de ce pouvoir n'aboutisse pas à priver de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel et à cet égard, le juge constitutionnel estime qu’en supprimant, à compter du 1er janvier 2022, la contribution à l'audiovisuel public, les dispositions contestées sont susceptibles d'affecter la garantie des ressources du secteur de l'audiovisuel public mais, poursuit toutefois le Conseil, ces dispositions prévoient qu’au titre de l'année 2022, les recettes sont constituées d'une fraction du produit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant équivalent au produit de la contribution à l'audiovisuel public au titre de cette même année et pour les deux années 2023 et 2024, les recettes proviennent d'une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée déterminée chaque année par la loi de finances de l'année.
Le Conseil émet deux réserves d’interprétation et dit qu'il « incombera au législateur, dans les lois de finances pour les années 2023 et 2024 et pour la période postérieure au 31 décembre 2024, de fixer le montant de ces recettes afin que les sociétés et l'établissement de l'audiovisuel public soient à même d'exercer les missions de service public qui leur sont confiées », précisant qu’il sera « le juge du respect de ces exigences » et sous ces réserves, les dispositions contestées sont parfaitement conformes à la Constitution.