Gilets jaunes - Gilets verts : deux combats !
Depuis plusieurs semaines, la France est secouée par le mouvement des « gilets jaunes ». Ce mouvement protéiforme s’est d’abord cristallisé autour de la hausse du prix du carburant et du ras-le-bol fiscal avant de faire apparaître des fractures plus profondes dans notre société qu’il nous faut réparer.
Un sentiment de décrochage et d’incompréhension a surgi dans nos campagnes et nous devons y répondre. Ce malaise, il est aussi présent chez les agriculteurs qui sont en grande détresse morale et économique depuis de nombreuses années.
Ce désespoir touche toute notre profession : depuis des années les paysans souffrent des sécheresses à répétition dont les effets sont de plus en plus lourds, des prix des productions agricoles qui sont de plus en plus bas, de la pression féroce des enseignes de la grande distribution ou encore d’un "agribashing" violent dans l’opinion publique qui dévalorise notre profession.
Les précédents gouvernements ont cherché des solutions : les agriculteurs sont aujourd’hui exonérés de la contribution climat énergie mais cela n’est pas suffisant pour combler nos pertes de trésorerie.
Le carburant, les paysans en utilisent le moins possible mais cela reste essentiel pour nos engins agricoles. La transition écologique est en cours et la prise de conscience est là : les agriculteurs en sont les premiers acteurs en produisant des énergies propres comme le photovoltaïque et la méthanisation. Mais cela ne pourra pas se faire du jour au lendemain car cela implique de lourds investissements.
Nous avons adopté des dispositions dans la loi agriculture et alimentation pour accompagner cette transition agro-écologique et nous avons voté des mesures dans le projet de loi de finances 2019 pour alléger la misère de certains agriculteurs pendant cette phase.
La taxe réduite de 18.82€/hl dont les paysans bénéficiaient en 2018 pour le gazole utilisé pour leurs engins sera maintenue en 2019 (taxe intérieure de consommation pour le gazole non routier).
Nous avons pris des engagements pour réduire cette taxe et la rendre plus simple pour les agriculteurs :
- Elle sera ramenée à 11,34 €/hl en 2020 et 3,86 €/hl en 2021.
- Les paysans n’auront plus à avancer cette taxe avant d’être remboursés : elle s’appliquera désormais directement à l’achat ce qui supprimera les démarches administratives liées à la demande de remboursement.
Nous avons créé un nouveau dispositif de déduction pour épargne de précaution en substitution de la déduction pour aléas : les paysans pourront désormais déduire de leur assiette fiscale et sociale des sommes, mobilisables à tout moment pendant 10 ans, pour les réintroduire dans leur compte de résultat afin de faire face à des aléas économiques ou d'investir dans de nouveaux moyens de production, sans avoir besoin de justifier leur utilisation.
Si les agriculteurs sont en colère, c’est parce qu’ils ne sont pas rémunérés à leur juste valeur, ce n’est pas parce que le gazole nous coûte trop cher ou que nous sommes trop taxés.
Si les agriculteurs sont révoltés, c’est parce que nous n’arrivons pas encore à vivre dignement de notre métier. J’éprouve aussi cette colère, je l’entends, je la comprends. Notre Président de la République, mes collègues députés et le Gouvernement l’ont aussi comprise.
Nous avons adopté la loi issue des Etats Généraux de l’agriculture et de l’alimentation dont le premier but est d’améliorer le revenu des paysans : pour la première fois les agriculteurs vont pouvoir proposer des prix qui intègrent leurs coûts de production pour tenir tête à la grande distribution! D’autres mesures comme le relèvement du seuil de revente à perte et l’encadrement des promotions permettront de redonner de l’air aux paysans.
Notre combat doit maintenant se poursuivre à l’échelle européenne avec la réforme de la prochaine Politique Agricole Commune, pas sur les ronds-points.
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Jean-Baptiste Moreau est député LREM de la Creuse.